Recherche Libre Mathématique

les maths à l'école autrement et pour tous

le bateau 2

abstraire, représenter
retour bateau 1

Le bateau

 

classe de cycle II : CP-CE1   |   6/8 ans   |   école 3 classes + 2 maternelles
recherche collective
connexions : fonctions, fonctions modulos

Le contenu de la page

5. prolongements

6. remarques

Prolongements

Cette recherche pourra être reprise plus tard, avec d’autres paramètres (effectif différent à cause d’absents, …) mais plus rapidement et plus efficacement puisqu’on pourra profiter du nouveau savoir construit. D’autres situations du même type (importance du reste pour la décision) que l’on appelle situations de modulo 2 (2 ici à cause des deux places) un jour ou l’autre nous interpelleront à nouveau : se ranger par deux, danser par deux, le jeu du cheval, beaucoup d’activités en EPS (judo, raquettes, tennis de table,…) mais aussi le stylo  à poussoir qui rentre et sort la mine, l’interrupteur, le manteau retourné (à l’envers), les nombres pairs et impairs, et aussi les compositions de transformations géométriques (plusieurs symétries d’axes parallèles à la suite, rotations (½ tours successifs) …  *

* tout cela sera développé dans l’onglet  » domaines math « , en particulier dans les sous-domaines fonctions.

On constatera que

15 enfants ne pourront tous partir en bateau ;
15 enfants ne pourront tous se ranger par deux ;
15 enfants ne pourront tous danser par deux ;
15 enfants ne pourront tous jouer au cheval ;
15 enfants ne pourront se répartir par atelier de deux, etc.

Toutes ces actions sont donc, pour la question posée, équivalentes. Elles appartiennent à une même famille que l’on pourrait appeler « par deux ».

                     par deux
15 enfants  ————> non
15 livres—————-> non
17 enfants  ————>  non
20 feutres   ————> oui

Peu à peu, le nombre cardinal va s’effacer au profit du nombre naturel.
Avec des enfants plus âgés, la recherche se poursuivra sur cet ensemble N. Il s’agira de s’éloigner puis d’abandonner le monde matériel des objets pour un monde de signes et de règles sur ces signes. La découverte d’un certain nombre de constantes (dans ce cas, les familles paires et impaires) permettra, avec la capacité d’anticipation, de savourer un peu de la puissance des mathématiques.

Remarques

Préliminaires :

Mon article sur le bateau est une re-présentation, au sens théâtral du terme : il donne une apparence concrète à une situation imaginaire (qui a eu lieu ou qui a été inventée)

– d’abord, un événement dans ma classe qui a eu un effet sur mon système nerveux ;
– et un « événement psychique » dans ma tête ;
– puis une certaine représentation (qui a abstrait de nombreuses caractéristiques) de l’événement-classe ;
– et enfin l’utilisation des mots de cet article (nouvelle abstraction) pour le communiquer.

Le chemin de l’événement vécu à l’article qui relate fait penser à celui d’un panier de fraises partant du producteur vers le consommateur : une augmentation vertigineuse ou de l’abstraction ou du prix. (ah ! les intermédiaires !)

Première abstraction :

. un événement est raconté aux nouvelles du lundi matin ; des mots (représentants quelquefois bien abstraits et bien pauvres) sont dits (texte) pour rendre présent un événement qui a été vécu (ailleurs et par un seul individu).

 . des questions nombreuses et diverses portant sur le lieu, la date, le couleur du bateau, le ciel, le lac, les émotions ressenties sont posées. Elles permettent à chacun de se représenter mentalement, de se construire l’image d’une situation réelle complexe et non présente.

 . l’adulte, lui, a abstrait l’événement de départ très fort par rapport à la possible piste mathématique qu’il a entrevue.
. les enfants eux, ont abstrait par rapport à leurs préoccupations (l’envie, la peur d’un tour en bateau, le plaisir d’une journée dans un parc d’attractions, car c’est de cela qu’il s’agit au départ !)

Deuxième abstraction :

Le dessin de la situation

Abstractions suivantes :

.  Passer d’une représentation à une autre, c’est changer de niveau d’abstraction. Représenter, c’est abstraire.
.  A chaque nouveau choix de représentation (par le corps avec le théâtre, par la médiation d’objets), la distribution des rôles dans la représentation d’un réel déjà bien «expurgé» varie. Les éléments sont représentés par des enfants de la classe, eux-mêmes, par leur photo ; le bateau  par un dessin à la craie par terre, un cerceau, une boîte.
Les propriétés en jeu e«les aussi évoluent : « être dans le bateau »  devient « être à l’intérieur du cerceau », « être dans une boîte », « être collée sur un dessin de bateau ».
Le réel raconté se dépouille un peu plus à chaque fois. De très nombreuses caractéristiques sont abstraites par rapport au problème posé qui peu à peu se centre sur les personnes et les bateaux. Le cerceau peut apparaître, pour celui qui raconte, comme un bien mauvais représentant du bateau. Il fait abstraction de trop de choses ! On ne conserve de toutes ses caractéristiques que la notion d’intérieur !

. Une représentation n’est ni bonne ni mauvaise en soi. On ne jugera de sa validité que par l’intérêt qu’elle apporte dans la poursuite du défi initial.

. Une représentation est le témoin du niveau d’abstraction atteint dans la recherche d’une solution.

 Construire des représentations, c’est construire une démarche de résolution.

Dernières abstractions :

Le saut est énorme : un enfant représenté par un cube ou une croix ! L’approche de « l’essence » numérique du problème élève le niveau d’abstraction de la recherche, donc de la représentation. Le cube, la croix ne conservent plus qu’une seule caractéristique de l’enfant qu’elle représente : c’est le fait d’être un.
Et « être dans le bateau » se traduit par « se situer à l’intérieur d’une ligne fermée ».

Permanence du sens

. A chaque distribution nouvelle se pose la conformité de la représentation. A ce niveau, la fonction de représentation a-t-elle conservé le nombre ?
. A chaque représentation, on peut se demander quelles sont les caractéristiques laissées de côté, on peut envisager le chemin parcouru (les croyances abandonnées, les progrès). Le réel se dépouille peu à peu pour mieux être cerné. Mais potentiellement, il reste toujours très vivant.
C’est le reste 1 ou 0 qui apportera la décision finale et la réponse au défi initial : « Tout le monde peut-il partir ? » Mais cette fois, en faisant le chemin inverse, du monde des signes vers le réel :
s’il reste 0,  tout le monde peut partir ;
s’il reste 1 , tout le monde ne peut pas partir.

D’autres défis seront lancés: « Et pour les deux classes ?, et si on était 100 ? … » Il sera intéressant d’observer à quel niveau de représentation (donc d’abstraction) les enfants vont se placer pour débuter leur recherche et quels chemins ils vont emprunter pour arriver à une solution (réinvestissement).

Des situations à priori différentes (se ranger par deux, jouer par deux,…) se présenteront. L’étude de celles-ci fera apparaître comme un lien de parenté avec l’histoire du bateau (certains s’inspireront de celle-ci pour résoudre celles-là). Elle amènera peu à peu à d’autres abstractions d’un niveau plus élevé.

On passera des ensembles de croix aux cardinaux (situations particulières), puis aux nombres naturels (abandon définitif (?) des propriétés matérielles de l’événement).

La réflexion se poursuivra alors à un degré d’abstraction très élevé : le concept de modulo, de groupe abélien. La distance avec l’événement initial (le bateau) sera considérable mais il sera toujours possible , si nécessaire, de concrétiser le concept par une actualisation plus ou moins forte du souvenir du bateau, les liens infimes, parfois à l’état de trace, entre l’un et l’autre, n’ayant pas disparu (l’événement de départ s’est juste potentialisé).

Le réel, représenté de façon très  dépouillée, « abstraite » ou même apparemment absent, reste cependant potentiellement vivant. Les chemins des abstractions et de la construction des représentations ont été vécus. Il peuvent être à nouveau réempruntés en partie si le besoin s’en fait sentir.

Une représentation toute faite proposée à un enfant risque souvent d’apparaître comme une représentation vide, morte parce que sans histoire et donc sans aucun sens.